• Prix François Bourdon – RAINHORN Judith, pour son ouvrage Blanc de plomb. Histoire d’un poison légal, SciencePo Les Presses, 372 p.

Les substances toxiques peuplent notre monde : nourriture, emballages alimentaires, textiles, produits cosmétiques, peintures, pas un domaine de la vie quotidienne n’échappe à la myriade de poisons suspectés ou avérés. Chacun le sait et, pourtant, y consent. Pour comprendre les raisons de cet accommodement collectif, l’historienne Judith Rainhorn a enquêté sur le blanc de plomb, la fameuse céruse, massivement fabriquée et utilisée pour blanchir la peinture qui a couvert les murs des villes européennes depuis la fin du XVIIIe siècle. Elle a suivi le poison, responsable du terrible saturnisme, des ateliers empoussiérés où les ouvriers l’ont jadis manipulé aux couloirs des hôpitaux où ils ont échoué, des échafaudages des peintres aux bancs des assemblées où l’on a débattu de sa suppression. Pendant deux siècles, la logique sociale, industrielle, scientifique et politique a imposé son rythme et ses nécessités, faisant de la céruse un poison légal.

  • Prix Jeune chercheur : MICHELI Adrien pour son mémoire, Des hommes et des clous, Les sentiers de l’industrialisation en Matheysine fin XVIIIème siècle – 1909, mémoire de Master 1 « Sciences humaines et sociales », Université Grenoble Alpes, 119 p. + annexes.

Des rues du vieux bourg isérois de La Mure aux ruisseaux escarpés du vallon de La Motte se logent jusqu’au début du XXème siècle de modestes clouteries où des centaines d’ouvriers s’affairent à forger des clous à la force des bras. Ce travail de recherche vise à mettre au jour les secrets jusque-là enfouis de l’adaptation jusqu’aux années 1880 de ce système proto-industriel aux méthodes artisanales face à la concurrence des premiers clous fabriqués en usine. Outre la qualité des produits de cette petite métallurgie, cette adaptation repose sur la pluriactivité des hommes et la création de sociétés commerciales à partir des années 1830. Une nouvelle génération de négociants cloutiers a construit et entretenu consciencieusement un important réseau commercial à l’échelle du quart sud-est de la France. En lien avec l’amélioration des communications, les voyageurs de commerce ont été aussi en première ligne pour démultiplier et fidéliser une clientèle toujours plus nombreuse et volatile.